Extrait du livret du Laurier "Un plan de vie chrétienne" de l'abbé Alphonse Vidal
La Congrégation pour les Causes des Saints, dans le texte cité ci-dessus, parle d’une étroite unité de vie chrétienne, et de la plénitude de la contemplation sur tous les chemins de la terre, comme fruits, dans la vie de beaucoup de chrétiens, de la prédication et de l’exemple de Mgr Escriva.
Tel est le but du plan de vie : parvenir à une contemplation habituelle de Dieu au milieu du monde, bâtir une solide unité de vie. Disons-le nettement : ce but serait hors d’atteinte si nous ne réservions jamais quelques moments à l’oraison mentale. Certes, la prière vocale — la récitation des formules déjà élaborées, comme le Notre Père, le Je vous salue Marie… — est une voie directe vers la contemplation. Nous allons justement en parler à propos de certaines normes de piété qui consistent essentiellement dans la récitation de quelques prières vocales. Mais il faut, en plus, parler avec Dieu, seul à seul, de même que pour entretenir et faire grandir l’amour ou l’amitié humains, deux personnes doivent communiquer, sortir des phrases toutes faites, pour se livrer mutuellement le fond de leur pensée et partager leurs sentiments.
Qu’est-ce que l’oraison ? Sainte Thérèse d’Avila répond : « L’oraison mentale n’est, à mon avis, qu’un commerce intime d’amitié où l’on s’entretient souvent seul à seul avec
ce Dieu dont on se sait aimé » Chemin de perfection, 26 » (CEC n. 2709).
Mgr Escriva, quant à lui, ne dit rien d’autre : « Tu m’as écrit : « Prier, c’est parler avec Dieu. Mais de quoi ? » — De quoi ? De Lui, de toi : joies, tristesses, succès et défaites, nobles ambitions, soucis quotidiens…, faiblesses ! actions de grâces et demandes, Amour et réparation. En deux mots, Le connaître et te connaître : se fréquenter ! » (Chemin n.91).
La première chose qui semble indispensable est le choix du temps et de la durée de l’oraison, comme expression d’une volonté déterminée (cf. CEC n. 2710). On ne fait pas l’oraison quand on a le
temps. On prend le temps nécessaire pour faire oraison, quitte à consentir quelques sacrifices et à se priver d’autres choses, bonnes et honnêtes, car la prière sera toujours prioritaire. Comme
pour tout le reste, le mieux est de commencer modestement et de progresser par étapes.
On peut essayer de faire, dans un premier temps, dix minutes de prière le samedi et dix minutes le dimanche. Ce serait un bon début. Puis, compte tenu des progrès accomplis, ce temps et cette
fréquence pourront être élargis : passer à un quart d’heure et à une fréquence quotidienne.
Quant à la méthode, aucune règle générale ne saurait être proposée, puisqu’il s’agit de quelque chose d’absolument personnel, comme l’amour et l’amitié. Chacun trouvera sa méthode qui s’adaptera
aux circonstances : besoins de son âme, problèmes, tentations, difficultés, projets. Cela dit, pour faire une prière fructueuse et éviter les distractions — ennemi numéro un de l’oraison —,
il est à conseiller de prendre un texte : l’Évangile, afin de mieux connaître le Christ, sa vie et sa doctrine ; un livre de spiritualité, pour bénéficier de l’expérience des saints et des
auteurs spirituels.
A cet égard, le bienheureux Josémaria Escriva a livré une partie de son expérience comme maître de prière, dans trois ouvrages dont l’utilisation est à recommander : Chemin, Forge et Sillon, trois livres composés de “maximes” qu’il est aisé de méditer, en la présence de Dieu. Nous commencerons donc la prière par la lecture de quelques lignes du texte choisi — très peu peuvent suffire —, et nous essaierons ensuite d’y méditer, dans un dialogue personnel avec le Seigneur.
Un autre aspect qui nécessite réflexion, afin d’assurer un choix judicieux, est celui du lieu où nous ferons notre moment de prière mentale. Il va sans dire que, si nous en avons la possibilité,
le mieux est d’aller dans une église, une chapelle, devant le Saint Sacrement. En quel autre endroit trouverons-nous des conditions meilleures ? : la présence réelle du Christ dans le tabernacle,
le calme et le silence. Mais l’impossibilité de s’y rendre ne devrait pas être un obstacle pour prier, car, en réalité, nous pouvons prier partout, au milieu du monde, en cherchant toutefois à
créer les conditions nécessaires à toute prière, un peu de silence et de recueillement. On peut prier dans sa chambre, à la maison : « Pour toi, quand tu pries, retire-toi dans ta chambre,
ferme sur toi la porte, et prie ton Père qui est là, dans le secret » (Mt 6, 6).
Si nous n’avons pas d’autre possibilité, on peut aussi prier au bureau ou dans les transports. L’important est de ne pas laisser tomber ce temps de prière, sous prétexte que les circonstances ne sont pas favorables.
« L’entrée en oraison est analogue à celle de la liturgie eucharistique : rassembler le coeur, recueillir tout notre être sous la mouvance de l’Esprit Saint, habiter la demeure du Seigneur
que nous sommes, éveiller la foi pour entrer en la présence de Celui qui nous attend, faire tomber nos masques et retourner notre coeur vers le Seigneur qui nous aime afin de nous remettre à Lui
comme une offrande à purifier et à transformer » (CEC n. 2711).
C’est pourquoi une bonne méthode consiste à faire un acte de foi qui, en quelque sorte, amorce la pompe et fasse monter l’eau du fond de notre cœur à nos lèvres. Se sentir sec et sans idées n’est pas un obstacle insurmontable. « Tu ne sais pas prier ? — Mets-toi en présence de Dieu et dès que tu as commencé à dire : « Seigneur, je ne sais pas faire oraison !… », sois assuré que tu es déjà en train de la faire » (Chemin, n. 90).
Pour répondre à un besoin personnel et pour aider d’autres à prier, le Bienheureux Escriva composa une formule d’introduction et une autre de conclusion de l’oraison mentale. « Mon Seigneur
et mon Dieu, je crois fermement que Tu es ici, que Tu me vois, que Tu m’entends. Je t’adore avec profonde révérence. Je te demande le pardon de mes péchés et la grâce de faire avec profit ce
moment de prière. Ma Mère immaculée, saint Joseph, mon Père et Seigneur, mon ange gardien, intercédez pour moi. »
Un très beau texte qui assure un passage rapide de nos activités ordinaires à l’intimité de la prière, avec un recours à l’intercession de ces personnes qui peuvent tant devant Dieu.
Et pour terminer, une formule semblable, qui met l’accent sur la gratitude et le désir d’être meilleur :
« Je te remercie, mon Dieu, des bonnes résolutions, des actes d’amour et des inspirations que Tu m’as communiqués dans cette méditation. Je te demande de m’aider à les mettre en pratique. Ma Mère immaculée, saint Joseph, mon Père et Seigneur, mon ange gardien, intercédez pour moi. »