30 novembre - Saint André
En ce temps là, comme Jésus marchait le long de la mer de Galilée, il vit deux frères, Simon, appelé Pierre, et son frère André, qui jetaient leurs filets dans la mer ; car c’étaient des pêcheurs.
Jésus leur dit : « Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. »
Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent.
De là, il avança et il vit deux autres frères, Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean, qui étaient dans la barque avec leur père, en train de réparer leurs filets.
Il les appela. Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.
Commentaire 1
Saint André a été appelé le « premier appelé ». Nous savons qu’il fut disciple de Jean-Baptiste et que, le premier, il décida de suivre le Seigneur, à qui il présenta son frère Simon (cf. Jn 1,40). Or peut-être avons-nous remarqué que dans la scène de l’appel rapportée par saint Matthieu, cette scène si simple et si belle, Simon est mentionné en premier. On nous précise même déjà qu’il était appelé Pierre. De fait, quand saint Jean raconte la première rencontre des deux frères avec Jésus, André, tout « premier appelé » qu’il fût, passe aussitôt au second plan. André amena son frère à Jésus. Jésus posa son regard sur lui et dit : « Tu es Simon, fils de Jean ; tu t’appelleras Kèphas » (Jn 1,42). C’est Pierre qui, pour ainsi dire, prend aussitôt toute la lumière.
Ce n’est pas tout. André est encore mentionné par saint Jean un peu plus loin. À ce moment, il est le frère de Simon-Pierre et c’est lui qui signale à Jésus qu’un jeune garçon a cinq pains d’orge et deux poissons (Jn 6,8). Et lui encore qui, requis par Philippe, prévient Jésus que des Grecs veulent le voir (cf. Jn 12,22). André avait manifestement un don pour les relations publiques…
Mais ces épisodes, qui constituent à peu près tout ce que nous savons avec certitude de saint André, portent une leçon plus profonde. Ils nous font entrevoir un homme qui a une grande proximité avec Jésus, une grande confiance, et qui passe son temps à lui présenter d’autres personnes, et à s’effacer. Le premier appelé est un fidèle second. Il joue les intermédiaires. Il est un instrument, et ne prétend pas être autre chose.
Une prophétie messianique avait dit : Voici que j’envoie en grand nombre – oracle du Seigneur – des pêcheurs qui les pêcheront (Jr 16, 16). Le premier de ces pêcheurs est notre saint André, et chacun de nous est un du grand nombre des autres. Certains sont brillants, doués, habiles en paroles ou porteurs de projets qui feront parler d’eux… Mais peut-être trouverons un modèle davantage à notre portée en regardant André : fidèle, discret, acceptant de se tenir à l’ombre d’un frère devenu pierre de fondation, il est pour toujours le premier des seconds.
Si nous cultivons notre intimité avec Jésus, nous saurons, nous aussi, lui présenter de meilleurs et plus grands que nous ; nous saurons ne pas prendre pour excuse de n’avoir ni renom, ni grands talents à mettre au service du Royaume. Dieu aime les seconds. Mieux : il aime les derniers, et tous ceux qui n’ont jamais été premiers en rien.
Carpe Deum - Un laïc
Commentaire 2
"Venez, suivez-moi". C'est Jésus qui appelle : "Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, mais moi qui vous ai choisis et placés" Ce n'est pas nous qui avons fait à Jésus l'honneur de le suivre, mais lui qui nous a fait l'honneur de nous appeler, qui nous a fait suffisamment confiance pour nous prendre à son service.
Il nous faut donc accepter une rupture : il faut quitter les filets, la barque, le père dans la barque. Rupture avec le métier, les habitudes (même les meilleures !), le gagne-pain, le gagne-sécurité. Rupture avec l'avenir prévu, préparé, préfabriqué, avec les filets préparés pour la pêche selon des techniques connues, éprouvées. Et cela "pour le suivre", c'est-à-dire aller derrière lui, aller là où il va, travailler où il travaille (à l'œuvre de rédemption), accueillir ce qu'il accueille, chercher ce qu'il cherche, des adorateurs pour le Père.
Il nous faut accepter certaines ruptures car c'est lui qui s'occupe de la continuité.
Nous resterons des gens qui vont pêcher, mais nous pêcherons avec le Pêcheur d'hommes. Jésus nous demandera une transposition de tout notre agir ; il fera servir notre savoir-faire, mais à un autre niveau, celui du Royaume en marche. Rien ne sera perdu du passé, de l'amour de la mer, du savoir-faire acquis dans la barque de Zébédée, et pourtant il faudra tout réapprendre, à l'école du nouveau Maître.
Pour chacun de nous l'appel de Jésus demeure un mystère, que nous l'entendions de loin, comme une voix qui n'arrive pas à se faire entendre, couverte qu'elle est par la rumeur du désir ; que nous l'entendions en nous comme un murmure, comme un ruisseau discret, mais inlassable ; que nous l'entendions comme le souvenir vivant d'un grand oui déjà prononcé, comme le rappel du premier appel, c'est le mystère des choix de Dieu, de Dieu qui est libre, divinement libre, et qui sait à la fois où il veut nous conduire et le grand raccourci qu'il va nous proposer.
Tous nous sommes des appelés, nous sommes conviés à travailler à plein temps dans le champ du Père, à moissonner, ou à glaner, dans la moisson de Jésus. Qui que nous soyons, nous pouvons rendre ce témoignage que les moments où nous sommes le plus fidèles à cet appel sont dans notre vie les périodes ou les instants de plus grande plénitude.
Mais savons-nous, voulons-nous suffisamment rendre à d'autres ce témoignage, spécialement aux jeunes que Jésus met sur notre route ? Peut-être ont-ils besoin, pour répondre à l'appel de Jésus : "Viens, suis-moi", de voir en nous des appelés heureux, des baptisés qui n'ont pas été déçus dans leur amitié avec le Christ, bref : des passionnés de Jésus-Christ ?
Un Carme
Commentaire 3
Les premiers disciples. (BOSSUET)
Jésus va commencer ses conquêtes. Il a déjà prêché son Évangile ; déjà les troupes se pressent pour écouter sa parole. Personne ne s'est encore attaché à lui, et parmi tant d'écoutants, il
n'a pas encore gagné un seul disciple. Aussi ne reçoit-il pas indifféremment tous ceux qui se présentent pour le suivre. Il y en a qu'il rebute, il y en a qu'il éprouve, il y en a qu'il diffère.
Il a ses temps destinés, il a ses personnes choisies. Il jette ses filets, il étend ses rets sur cette mer du siècle, mer immense, mer profonde, mer orageuse et éternellement agitée. Il veut
prendre des hommes dans le monde, mais quoique cette eau soit trouble, il n'y pêche pas à l'aveugle. Il sait ceux qui sont à lui ; il regarde, il considère, il choisit. C'est aujourd'hui le
choix d'importance ; car il va prendre ceux par qui il a résolu de prendre les autres ; enfin il va choisir ses apôtres. Jésus ne rebute donc point les grands, ni les puissants ni les
sages «Il ne les rejette pas, il les diffère» (saint Augustin).
En attendant, venez, ô pécheurs ; venez, saint couple de frères, André et Simon. Vous n'êtes rien, vous n'avez rien. Il n'y a rien en vous qui mérite d'être recherché. Il y a seulement une
vaste capacité à remplir... Vous êtes vides de tout et vous êtes principalement vides de vous-mêmes. Venez recevoir, venez vous remplir à cette source infinie. Nous avons trouvé le Messie
Commentaire 4
Benoît XVI : Saint André suit le Christ jusque dans sa mort
Une tradition (...) raconte la mort d'André à Patras, où il subit le supplice de la crucifixion. Mais en ce moment suprême, d'une manière analogue à son frère Pierre, il demanda à être mis sur une croix différente de celle de Jésus. En son cas, il s'agit d'une croix décussée, c'est-à-dire à croisement transversal incliné, qui est pour cela appelée « croix de saint André ». Voici ce que l'apôtre aurait dit en cette occasion, selon un vieux récit : « Salut, ô croix, inaugurée avec le corps du Christ et devenue l'ornement de ses membres, comme si c'étaient des pierres précieuses. Avant que le Seigneur monte sur toi, tu inspirais une crainte terrestre. Maintenant au contraire, dotée d'un amour céleste, sois reçue comme un don. Les croyants savent, à ton égard, quelle joie tu possèdes, quels cadeaux tu tiens préparés. Aussi, sûr et plein de joie, je viens à toi pour que, toi aussi, tu me reçoives, dans l'exultation, comme celui qui fut suspendu à toi. (...) Ô croix bienheureuse, qui as revêtu la majesté et la beauté des membres du Seigneur. (...) Prends-moi et porte-moi loin des hommes et rends-moi à mon Maître, afin que par ton intermédiaire me reçoive celui qui m'a racheté. Salut, ô croix, oui, vraiment, salut ! » Comme on le voit, il y a là une spiritualité chrétienne très profonde, qui voit dans la croix non pas tellement un instrument de torture mais bien plutôt le moyen incomparable d'une pleine assimilation au Rédempteur, au grain de blé tombé en terre (Jn 12,24). Nous devons apprendre de cela une leçon très importante : nos croix acquièrent de la valeur si elles sont considérées et accueillies comme une partie de la croix du Christ, si elles reflètent sa lumière. C'est seulement par cette croix que nos souffrances sont ennoblies et acquièrent leur vrai sens.
Audience générale du 14/06/06 (trad. DC n° 2362, p. 664 © copyright Libreria Editrice Vaticana)
Commentaire 5
SAINT ANDRÉ, APÔTRE
André veut dire beau, ou caution, ou viril, d'ander, homme ; ou bien encore anthrôpos, homme, d'ana, au-dessus, et tropos tourné, ce qui est la même chose que converti, comme s'il eût été
converti aux choses du ciel et élevé vers son créateur. Aussi, est-il beau dans sa vie, caution d'une doctrine pleine de sagesse, homme fort dans son supplice, et élevé en gloire. Son martyre fut
écrit par les prêtres et les diacres d'Achaïe ou d'Asie qui en ont été les témoins oculaires.
André et quelques autres disciples furent appelés à trois reprises différentes par le Seigneur. La première (19) fois qu'il les appela à le connaître, ce fut un jour qu'André avec un autre
disciple ouï dire par Jean, son maître : « Voici l’agneau de Dieu, voici celui qui efface les péchés du monde. » Et tout aussitôt, avec cet autre disciple, il vint et vit où
demeurait Jésus, et ils passèrent ce jour auprès de lui. Et André ayant rencontré Simon, son frère, il l’amena à Jésus. Le lendemain ils retournèrent à leur métier de pêcheurs. Plus tard il les
appela pour la seconde fois à vivre avec lui. Ce fut le jour où la foule se pressait sur, les pas de Jésus auprès du lac de Génésareth aussi appelé mer de Galilée ; le Sauveur entra dans la
barque de Simon et d'André, et après une pêche extraordinaire, il appela Jacques et Jean qui étaient dans une autre barque. Ils le suivirent et revinrent ensuite chez eux. Jésus les appela la
troisième et dernière fois pour être ses disciples, lorsque se promenant sur le bord . de cette même mer où ils se livraient à la pêche : « Venez, leur dit-il, et je vous ferai pêcheurs
d'hommes. » Ils quittèrent tout à l’instant pour le suivre toujours et ne plus retourner en leur maison. Toutefois il appela André et d'autres de ses disciples à l’apostolat, selon que le
rapporte saint Marc (III) : « Il appela à lui ceux qu'il voulut lui-même et ils vinrent à lui au nombre , de douze. »
Après l’ascension du Seigneur, et la séparation des Apôtres, André prêcha en Scythie et Mathieu en Myrmidonie (L'Ethiopie. Nicéphore appelle la ville Myrmenen, lib. I, c. XLI, il ajoute que
c'était le pays des anthropophages.). Les habitants de ce dernier pays refusèrent d'écouter Mathieu, lui arrachèrent les yeux, le mirent dans les fers avec l’intention de le tuer quelques jours
après. Sur ces entrefaites, l’ange du Seigneur apparut à saint André et lui ordonna d'aller en Myrmidoaie trouver saint Mathieu. Sur sa réponse qu'il n'en connaissait pas la route, il lui fut
ordonné d'aller au bord de la mer et de monter sur le premier navire qu'il trouverait. Il exécuta tout de suite les ordres, qu'il recevait, et sous la conduite d'un ange, il vint, à l’aide d'un
vent favorable, à la ville qui lui avait été désignée, trouva ouverte la prison de saint Mathieu et se mit à pleurer beaucoup et à prier en le voyant. Alors le Seigneur rendit à Mathieu le bon
usage de ses deux yeux dont l’avait privé la malice des pécheurs. Mathieu s'en alla ensuite et vint à Antioche. André resta dans la ville dont les habitants, irrités de l’évasion de Mathieu,
saisirent André et le traînèrent sur les places après lui avoir lié les mains. Et comme son sang coulait, il pria pour eux, et par sa prière les convertit à J.-C., de là il partit pour l’Achaïe
(S. Jérôme ; Épître 148 à Marcelle ; — Grégoire de Tours De Gloria Martyr., lib. I, c. XXXI ; — S. Paulin, Gaudence de Bresce, Pierre Chrysologue, etc.
La lettre des prêtres d'Achaïe, sur le martyre de saint André, est une pièce du 1er au IIe siècle, qui a été démontrée authentique par le protestant Woog. Voyez sur cette épître la préface de
Galland Veter Patr. Biblioth., I, prol., p. 38.). Ce qu'on rapporte ici de la délivrance de Mathieu et de la guérison de ses deux yeux, je ne le crois. pas digne de foi ; car ce serait peu
d'honneur porter à un si grand évangéliste de croire qu'il n'a pu obtenir pour soi-même ce que André obtint si facilement. Un jeune noble (Abdias, Saint André, c. XII.) s'étant attaché à l’apôtre
malgré ses parents, ceux-ci mirent le feu à une maison où leur fils demeurait avec André. Comme la flamme s'élevait déjà fort haut, ce jeune homme prit un vase, en répandit l’eau sur le feu qui
s'éteignit aussitôt. « Notre fils, dirent alors ses parents, est déjà un grand magicien. » Et pendant qu'ils voulaient monter au moyen des échelles, Dieu les aveugla au point qu'ils ne
les voyaient même pas. Alors quelqu'un s'écria : « À quoi vous sert de vous consumer en vains efforts ? Dieu combat pour eux et vous ne le voyez point ! Cessez donc, de
crainte que la colère de Dieu ne descende sur vous. » Or beaucoup de témoins de ce fait crurent au Seigneur ; quant aux parents ; ils moururent et furent enterrés cinquante jours
après.
Une femme mariée à un assassin ne pouvait accoucher : « Allez, dit-elle à sa sueur, invoquer pour moi Diane notre déesse. » Le diable dit à celle qui l’invoquait :
« Pourquoi t'adresser à moi qui ne saurais te secourir ? Va plutôt trouver l’apôtre André qui pourra aider ta sœur (Idem, Ibid., c. XXX.) »
Elle y alla, et mena l’apôtre chez sa sœur en danger de périr. Il lui dit : « Il est juste que tu souffres, car tu es mal mariée ; tu as conçu dans le mal, et tu as consulté les
démons. Cependant repens-toi, crois en J.-C. et accouche. » Elle crut, et accoucha d'un avorton ; puis sa douleur cessa.
Un vieillard nommé Nicolas alla trouver l’apôtre et lui dit (Abdias, Saint André, c. XXXIII.) : « Seigneur, depuis soixante-dix ans je vis esclave de passions infâmes. J'ai cependant
reçu l’évangile, et ai prié pour que Dieu m’accordât la continence. Mais accoutumé à ce péché, et séduit par la concupiscence, je suis retourné à mes désordres habituels. Un jour que brûlant, de
mauvais, désirs, j'avais oublié que je portais l’évangile sur moi, j'entrai dans une maison de débauche : et la courtisane me dit aussitôt : « Sors, vieillard, sors, car tu es un
ange de Dieu. Ne me touche pas et ne t'avise pas d'approcher ; car je vois sur toi des prodiges. » Effrayé des paroles de cette femme, je me suis rappelé que j'avais apporté sur moi
l’Évangile. Maintenant donc, saint de Dieu, obtenez mon salut par vos saintes prières. » En l’entendant, le bienheureux André se mit à pleurer, et depuis tierce jusqu'à none. il pria. Se
levant de sa prière, il ne voulut point manger, mais il dit : « Je ne mangerai point avant de savoir si le Seigneur aura pitié de ce vieillard. » Après cinq jours de jeûne, une
voix se fit entendre à André et dit : « André, tu obtiens ce que tu sollicites pour ce vieillard, mais de même que tu t'es macéré par le jeûne aussi faut-il que pour être sauvé, lui
aussi s'affaiblisse par les jeûnes. »
C'est ce que fit le vieillard en jeûnant pendant six mois au pain et à l’eau ; après quoi, plein de bonnes œuvres, il reposa en paix. Et une voix dit à André : « Par ta, prière,
j'ai recouvré Nicolas que j'avais perdu. »
Un jeune chrétien confia ce qui suit sous le plus grand secret à saint André (Adias, Saint André, c. VI.). « Ma mère, éblouie de ma beauté, me tenta pour une œuvre illicite : comme je
n'y consentais pas, elle alla trouver le juge, dans l’intention de faire peser sur moi l’énormité d'un tel crime : mais priez pour moi de peur que je ne meure injustement ; car lors de
l’accusation, je préférerai me taire et perdre la vie plutôt que déshonorer ainsi ma mère. » Le jeune homme est donc mandé cri justice : André l’y suit. La mère accusé positivement son
fils d'avoir voulu la violer. Interrogé plusieurs fois si la chose s'était ainsi passée, le jeune homme ne répondit mot. André dit alors à cette mère « Ô la plus cruelle des femmes, de
vouloir la perte de ton fils unique pour satisfaire ta débauche ! » La mère dit donc au juge : « Seigneur, voilà l’homme auquel s'est attaché pion fils après qu'il eût tenté
de consommer son crime, sans pouvoir le commettre. » Alors le juge irrité condamna le jeune homme à être mis en un sac enduit de poix et de bitume puis ensuite jeté dans la rivière ; et
il ordonna de garder en prison André, jusqu'à ce qu'il eût trouvé un supplice pour le faire périr.
Mais à la prière d'André, un tonnerre horrible épouvanta les assistants, et un tremblement de terre les renversa tous, en même temps que la ; femme, frappée de la foudre, était desséchée.
Tous conjurèrent alors l’apôtre de ne pas les perdre. Il pria pour eux et le calme se fit. Le juge crut ainsi que toute sa maison.
Comme l’apôtre était à Nicée, les habitants lui dirent que sur le chemin qui menait à la ville, se trouvaient sept démons qui tuaient les passants (Abdias, Saint André, c. VII.). L'apôtre les fit
venir sous la forme de chiens devant le peuple et leur commanda d'aller où ils ne pourraient nuire à personne. Aussitôt ils disparurent. À cette vue, ces hommes reçurent la foi de J.-C. En
arrivant à la porte d'une autre ville, l’apôtre rencontra le convoi d'un jeune homme qu'on portait en terre : et comme il s'informait de l’accident, il lui fut dit que sept chiens étaient
venus et l’avaient fait mourir dans son lit. André se mit à pleurer et dit : « Je sais bien, Seigneur, que c'est le fait des démons que j'ai chassés de Nicée. » Et s'adressant au
père : « Que me donneras-tu, lui demanda-t-il, si je ressuscite ton fils ? » « C'est tout ce que je possédais de plus cher au monde, répondit le père, je te le
donnerai. » L'apôtre fit une prière et ressuscita l’enfant qui s'attacha à lui.
Un, jour quarante hommes vinrent par mer trouver l’apôtre afin de recevoir de lui la doctrine de la foi, mais le diable excita une tempête, qui les engloutit tous. Leurs corps ayant été rejetés
sur le rivage, furent portés à l’apôtre et tout aussitôt ressuscités. Ils racontèrent tout ce qui leur était arrivé.
De là vient qu'on lit dans une des hymnes de son office : « Il rendit à la vie quarante : personnes que les flots avaient englouties. » Maître Jean Beleth (Rationale, c.
CLXIV,) dit en traitant de la fête de saint André, qu'il avait le teint brun, la barbe épaisse et une petite taille.
Or saint André resta en Achaïe, y fonda de nombreuses églises et convertit beaucoup de monde à la foi du Christ. Il instruisit même la femme du proconsul Egée et la régénéra dans les eaux sacrées
du baptême. À cette nouvelle, Egée vient à Patras pour contraindre les chrétiens à sacrifier aux idoles. André alla a sa rencontre et lui dit : « Il fallait que toi qui as l’honneur
d'être ici-bas le juge des hommes, tu connusses et ensuite tu honorasses ton juge qui est dans le ciel, après avoir renoncé en ton cœur aux faux dieux.(Abdias, Saint André, c. XXVI.). » Égée
lui répliqua : « C'est toi qui es André : tu enseignes les dogmes de cette secte superstitieuse que les empereurs romains viennent de prescrire d'exterminer. » « Les
empereurs romains, dit André, n'ont pas encore appris que le Fils de Dieu, en venant sur la terre, a enseigné que les idoles sont des démons qui apprennent à offenser Dieu ; en sorte
qu'offensé par les hommes il détourne d'eux son visage, qu'irrité contre eux, il ne les exauce point, et qu'en ne les exauçant pas, ils sont les esclaves et le jouet du diable, jusqu'à ce que
dépouillés de tout en sortant de leur corps, ils n'emportent avec eux rien autre que leurs péchés. » Egée : « Votre Jésus qui prêchait ces sottises a été attaché au gibet de la
croix. André répartit : « C'est pour nous racheter et non pour des crimes qu'il a bien voulu souffrir le supplice de la croix. » Égée : « Il a été livré par son disciple,
pris par les Juifs et crucifié par les soldats ; comment donc peux-tu dire qu'il a souffert de plein gré le supplice de la croix ! » Alors André démontra par cinq raisons que
Jésus-Christ avait souffert parce qu'il l’avait voulu. 1° Il a prévu et prédit sa passion à ses disciples, lorsqu'il dit : « Voici que nous allons à Jérusalem, etc... » 2° Quand
saint Pierre voulut l’en détourner il s'indigna fortement et lui dit : « Va-t-en derrière moi ; Satan, etc... » 3° Il a clairement annoncé qu'il avait le pouvoir et de
souffrir et de ressusciter tout à la fois, lorsqu'il dit : « J'ai la puissance de quitter la vie et de la reprendre. » 4° Il a connu d'avance celui qui le trahissait, lorsqu'il lui
donna du pain trempé, et cependant il ne se garda pas de lui. 5- Il choisit l’endroit où il savait que devait venir le traître. Lui-même assura avoir été témoin de chacun de ces 'faits ; il
ajouta que c'était un grand mystère que celui de la croix. Égée répondit : « On rie saurait appeler mystère ce qui 'fut un supplice ; cependant si tu n'obtempères pas à mes ordres,
je te ferai passer par l’épreuve du même mystère. » André : « Si j'étais épouvanté du supplice de la croix, je n'en proclamerais point la gloire. Or je veux t'apprendre ce mystère
de la croix, peut-être qu'en le connaissant tu y croiras ; tu l’adoreras et tu seras sauvé. » Alors il commença à lui dévoiler le mystère de la Rédemption et lui en prouva par cinq
arguments la convenance et la nécessité. Le premier argument est que le premier homme ayant donné naissance à la mort par le bois, il était convenable que le second homme détruisît la mort en
souffrant sur le bois. Le second, que le prévaricateur ayant été formé d'une terre immaculée, il était juste que le réconciliateur naquit d'une vierge immaculée.
Le troisième, que Adam ayant étendu la main avec intempérance vers le fruit défendu, il seyait que le second Adam étendît sur la croix ses mains immaculées. Le quatrième, que Adam ayant goûté de
l’arbre défendu un fruit agréable, il était convenable que le Christ, lorsqu'il fut abreuvé de fiel, détruisît le contraire par son contraire. Le cinquième est que, pour nous conférer son
immortalité, il importait que le Christ prît avec lui notre mortalité : car si Dieu ne s'était fait mortel, l’homme ne fût pas devenu immortel. Alors Égée dit : « Va conter aux
tiens ces rêveries, et obéis-moi en sacrifiant aux dieux tout-puissants. » « Chaque jour, répondit André, j'offre au Dieu tout-puissant l’agneau sans tache, et quand il a été mangé par
tout le peuple, cet agneau reste vivant et entier. » Égée demandant comment cela pouvait-il se faire, André lui répondit de se mettre au nombre des disciples. Égée répliqua :
« Avec des tourments, je saurai bien te faire expliquer la chose. » Et tout en colère, il le fit enfermer dans une prison. Le matin étant venu, il s'assit sur son tribunal et de nouveau
il l’exhorta à sacrifier aux idoles. « Si tu ne m’obéis, lui dit-il, je te ferai suspendre à cette croix que tu as glorifiée. » Et comme il le menaçait de nombreux tourments, André
répondit : « Invente tout ce qui te paraîtra de plus cruel en fait de supplice. Plus je serai constant à souffrir dans les tourments pour le nom de mon roi, plus je lui serai agréable.
Alors Égée le fit fouetter par vingt hommes, et le fit lier ensuite à une croix par les mains et par les pieds afin qu'il souffrît plus longtemps. Et comme il était (28) conduit à la croix, il se
fit un grand concours de peuple qui disait : « Il est innocent et condamné sans, preuves à verser son sang. » Cependant, l’apôtre pria cette foule de- ne point s'opposer, à son
martyre. Et quand André aperçut la croix de loin, il la salua en disant : « Salut, ô croix consacrée par le sang de J.-C., et décorée par chacun de ses membres comme avec dés pierres
précieuses. Avant que le seigneur eût été élevé sur toit tu étais un sujet d'effroi pour la terre ; maintenant en procurant l’amour du ciel, tu es l’objet de tous les désirs. Plein de
sincérité et de joie, je viens à toi afin de te procurer la joie de recevoir en moi un disciple de celui qui a été pendu sur toi. En effet toujours je t'ai aimée et ai désiré t'embrasser. Ô bonne
croix 1 qui as reçu gloire et beauté des membres du Seigneur. Toi que j'ai longtemps désirée, que j'ai aimée avec sollicitude, que j'ai recherchée sans relâche et qui enfin es préparée à, mon âme
désireuse, reçois-moi du milieu des hommes, et me rends à mon maître afin qu'il me reçoive par toi, lui qui par toi m’a racheté. » En disant ces mots, il se dépouilla de ses vêtements qu'il
donna aux bourreaux. Alors ceux-ci le suspendirent à la croix, comme il leur avait été prescrit. Pendant deux jours qu'il y vécût, ii prêcha à vingt mille hommes qui l’entouraient. Cette foule
menaçait Égée de le faire mourir, en disant qu'un saint doux et pieux ne devait pas ainsi périr ; Egée vint pour le délivrer. À sa vue André lui dit : « Pourquoi viens-tu vers
nous ? Si c'est pour demander pardon, tu l’obtiendras ; mais si c'est pour me détacher, sache que je ne descendrai pas vivant de la croix. Déjà en (29) effet je vois mon roi qui
m’attend. » Et comme on voulait le délier, on ne put y parvenir, parce que les bras de ceux qui essayaient de le faire devenaient paralysés. Pour André, comme il voyait que le peuple le
voulait délivrer, il fit cette prière sur la croix, comme la rapporte saint Augustin en son livre de la Pénitence. « Ne permettez pas, Seigneur, que je descende vivant, il est temps que vous
confiiez mon corps à la terre, car tant que je l’ai porté, tant j'ai veillé à sa garde ; j'ai travaillé à vouloir être délivré de ce soin, et à être dépouillé de ce très épais vêtement. Je
sais combien je l’ai trouvé lourd à porter, redoutable à vaincre, paresseux à enflammer et prompt à faiblir. Vous savez, Seigneur, combien il était porté à m’arracher aux pures
contemplations ; combien il s'efforçait de me tirer du sommeil de votre charmant repos. Toutes et quantes fois il me fit souffrir de douleur. Chaque fois que je l’ai pu, Père débonnaire,
j'ai résisté en combattant et j'ai vaincu avec votre aide. C'est à vous, juste et pieux rémunérateur, que je demande de ne plus me confier à ce corps : mais, je vous rends ce dépôt.
Confiez-le à un autre, et ne m’opposez plus par lui d'obstacles. Qu'il soit conservé et rendu à la résurrection, afin que vous retiriez honneur de ses œuvres. Confiez-le à la terre afin de ne
plus veiller, afin qu'il ne m’empêche pas de tendre avec ardeur et librement vers vous qui êtes la source d'une vie de joie intarissable. » (Saint Augustin, De vexa et falsa poenit., c.
VIII). Après ces paroles, une lumière éclatante venue du ciel l’entoura pendant une demi-heure, en sorte que personne ne pouvait fixer sur lui les yeux ; et cette lumière disparaissant, il
(30) rendit en même temps l’esprit. Maximilla, l’épouse d'Egée, prit le corps du saint apôtre et l’ensevelit avec honneur (Bréviaire romain.). Quant à Egée, avant d'être rentré dans sa maison, il
fut saisi par le démon et à la vue de tous il expira sur le chemin. On dit (Saint Grégoire de Tours, ubi supra.) que du tombeau de saint André découle une manne semblable à de la farine et une
huile odoriférante. Les habitants du pays en tirent un présage pour la récolte : car si ce qui coule est en petite quantité, la récolte sera peu-considérable, s'il en coule beaucoup, elle
sera abondante. Peut-être qu'il en a été ainsi autrefois, mais aujourd'hui on prétend que son corps a été transporté à Constantinople.
Un évêque, qui menait une vie sainte, avait une vénération particulière pour saint André, en sorte qu'à chacun de ses ouvrages, il mettait en tête : « À l’honneur de Dieu et de saint
André. » Or jaloux de la sainteté de ce personnage, l’antique ennemi, pour le séduire, après avoir employé toutes sortes de ruses, prit la forme d'une femme, merveilleusement belle. Elle
vint au palais de l’évêque sous prétexte de vouloir se confesser à lui. Sur l’ordre de l’évêque de l’adresser à son pénitencier qui avait tous ses pouvoirs, elle répondit qu'elle ne révélera à
nul autre qu'à lui les secrets de sa conscience. Le Prélat touché la fait entrer. « Je vous en conjure, Seigneur ; lui dit-elle, ayez pitié de moi : car jeune encore, ainsi que
vous le voyez, élevée dans les délices dès mou enfance, issue même de race royale, je suis venue seule ici sous l’habit des pèlerins. Le roi mon père, prince très puis-, sont, voulant me marier à
un grand personnage ; je lui ai répondu que j'avais en horreur le lien du mariage, puisque j'ai consacré ma virginité pour toujours à J.-C. et qu'en conséquence je ne pourrais jamais
consentir à la perdre. Pressée d'obéir à ses ordres, ou de subir sur la terre différents supplices, je pris secrètement la fuite, préférant m’exiler que de violer la foi jurée à mon époux. La
renommée de votre sainteté étant parvenue à mes oreilles, je me suis réfugiée sous les ailes de votre protection, dans l’espoir de trouver auprès de vous un lieu de repos où je puisse jouir en
secret des douceurs de la contemplation, me sauver des naufrages de la vie présente, enfuir le bruit et les agitations du monde. » Plein d'admiration pour la noblesse de sa race, la beauté
de sa personne, sa grande ferveur, et l’élégance remarquable de ses paroles, l’évêque lui répondit avec bonté et douceur « Soyez tranquille, ma fille ; ne craignez point, car celui pour
l’amour duquel vous avez méprisé avec tant de courage et vous-même, et vos parents et vos biens, vous accordera, pour ce sacrifice, le comble de la grâce en cette vie et la plénitude de la gloire
en l’autre. Aussi moi qui suis son serviteur, je m’offre à vous avec ce qui m’appartient : choisissez l’appartement qu'il vous plaira, et je veux qu'aujourd'hui vous mangiez avec moi. »
« Veuillez, ah ! veuillez, dit-elle, mon Père, ne pas exiger cela de moi, de peur d'éveiller quelque mauvais soupçon et de porter quelque atteinte à l’éclat de votre réputation. »
« Nous serons (32) plusieurs, lui répondit l’évêque, nous ne serons pas seuls, et ainsi il n'y aura pas lieu de fournir eu quoi que ce soit l’apparence à mauvais soupçon. » Les convives
se mirent à table, l’évêque se plaça en face de la dame et les autres de l’un et de l’autre côté. L'évêque eut beaucoup d'attention pour cette femme ; il ne cessa de la regarder et d'en
admirer la beauté. Pendant qu'il a les yeux fixés ainsi, son âme est atteinte, et tandis qu'il ne cesse de la regarder, l’antique ennemi lance contre son cœur une flèche acérée. Le Diable, qui
tenait compte de tout, se mit à augmenter de plus en plus sa beauté. Déjà l’évêque était sur le point de. donner son consentement à la tentation de commettre avec cette personne une action
criminelle dès que la possibilité s'en présenterait, quand tout à coup un pèlerin vient heurter à la porte avec violence, demandant à grands cris qu'on lui ouvre. Comme on s'y refusait et que le
pèlerin devenait importun par ses clameurs et ses coups répétés, l’évêque demande à la femme si elle voulait recevoir ce pèlerin. « Qu'on lui propose, dit-elle, quelque question
difficile ; s'il sait la résoudre, qu'on l’introduise ; s'il ne le peut, qu'on l’éloigne, comme un ignorant, et comme une personne indigne de paraître devant l’évêque. » On
applaudit à la proposition, et l’on se demande qui sera capable de poser la question. Et comme on ne trouvait personne : « Quelle autre, madame, reprit l’évêque, peut mieux poser la
question que vous qui l’emportez sur nous autres en éloquence et dont la sagesse brille au-dessus de la nôtre à tous ? Proposez donc vous-même une question. » « Qu'on lui demande,
dit-elle, ce que Dieu a fait de plus merveilleux (33) dans une petite chose. » Le pèlerin auquel un messager porta la question répondit : « C'est la variété et l’excellence du
visage. Parmi tant d'hommes qui ont existé depuis le commencement du monde, et qui existeront dans l’avenir, on n'en saurait rencontrer deux dont les visages soient semblables en tout point, et
cependant, dans une si petite figure, Dieu a placé tous les sens du corps. » En entendant cette réponse on s'écria avec admiration : « C'est vraiment une excellente solution à la
demande. » Alors la dame dit : « Qu'on lui en propose une seconde plus difficile qui mette sa science à meilleure épreuve : « Qu'on lui demande où la terre est plus,
haute que le ciel tout entier. » Le pèlerin interrogé répondit : « Dans le ciel empyrée, où réside le corps. de J.-C. Le corps du Christ en effet, qui est plus élevé que tout le
ciel, est formé de notre chair ; or notre chair est une portion de la substance de la terre : comme donc le corps du Christ est au dessus de tous les cieux, et qu'il tire son origine de
notre chair, que notre chair est formée de la terre, il est donc constant que là où le corps de J.-C. réside, là certainement la terre est plus élevée que le. ciel. » L'envoyé rapporte la
réponse du pèlerin, et tous d'approuver cette solution merveilleuse et d'en louer hautement la sagesse. Alors la femme dit encore : « Qu'on lui pose de nouveau une troisième question
très grave, compliquée, difficile à résoudre, obscure, afin que, pour la troisième fois, il soit prouvé qu'il est digne à juste titre d'être admis à la table de l’évêque. Demandez-lui quelle
distance il y a de la terre au ciel. » Le pèlerin répondit à l’envoyé qui lui portait (34) la question : « Allez le demander à celui-là même qui' a posé la demande. Il le sait
certainement et il pourra répondre mieux que je ne le ferais ; car lui-même a mesuré cette distance, quand du ciel il est tombé dans l’abîme ; pour moi je ne suis jamais tombé du ciel
et n'ai jamais mesuré cet espace. Car ce n'est pas une femme, mais le diable qui s'est caché sous la ressemblance d'une femme. » À ces paroles le messager fut pâmé, et répéta devant tous les
convives ce qu'il avait entendu. Tandis que l’étonnement et la stupeur ont saisi les convives, le vieil ennemi a disparu. L'évêque, rentrant en lui-même, se reprochait amèrement sa conduite et
demandait avec lamentations le pardon de la faute qu'il avait commise. Il envoya aussitôt pour qu'on introduisît le pèlerin, mais on ne lé trouva plus. L'évêque convoqua le peuple, lui exposa de
point en point ce qui s'était passé, et commanda des jeûnes et des prières pour que le Seigneur daignât révéler quel était ce pèlerin qui l’avait sauvé de si grand péril. Et cette nuit-là même,
il fut révélé à l’évêque que c'était saint André qui, pour le délivrer, avait pris l’extérieur d'un pèlerin. L'évêque redoubla de dévotion envers le saint apôtre et il ne cessa de donner des
preuves de sa vénération pour lui.
Le prévôt d'une ville (D'après saint Grégoire de Tours, De gloria nnartyrum, l. I, c. LXXIX, cet homme était Gomacharus, comte de la ville d'Agde, vers la fin du VIe siècle.) s'était emparé d'un
champ de saint André, et par les prières de l’évêque, il en fut puni de très fortes fièvres. Il alla trouver le prélat, le conjurant d'intercéder en sa faveur et lui promit de restituer le champ.
Mais après sa guérison obtenue par l’intercession du pontife, il reprit une seconde fois la : terre. Alors l’évêque se mit en prières et brisa toutes les lampes de l’église, eu disant :
« Qu'on n'allume plus ces lumières, jusqu'à ce que le Seigneur se venge lui-même de son ennemi, et que l’église recouvre ce qu'elle a perdu. » Et voilà que le prévôt eut encore de très
fortes fièvres ; il envoya alors demander à l’évêque de prier pour lui, l’assurant qu'il rendrait son champ, et en surplus un autre de la même valeur. Comme l’évêque lui faisait répondre
toujours : « J'ai déjà prié, et Dieu m’a exaucé, » le prévôt se fit porter chez le prélat et le força d'entrer dans l’église pour prier.
À l’instant où l’évêque entre dans l’église, le prévôt meurt subitement et le champ est restitué à l’église.
Commentaire 6
Saint Jean Chrysostome - Homélies sur l'évangile de saint Matthieu, n°14
Mais voyez la foi et la docilité des disciples. C’est pendant qu’ils jettent leurs filets, c’est au milieu de leur travail que Jésus leur parle; or, vous savez combien la pêche est une occupation attrayante, et, à peine ont-ils entendu son ordre, qu’ils le suivent sans différer, sans hésiter. Ils ne disent point: Nous allons seulement jusqu’à la maison, pour faire les derniers adieux à nos proches. Ils quittent tout dès l’heure même et font ce qu’Elisée fit autrefois à l’égard d’Elie. C’est ainsi que Jésus-Christ exige de nous une obéissance prompte et parfaite, et qui exclut tout retard quand même les empêchements les plus forts nous retiendraient. C’est ainsi qu’un autre de ses disciples l’ayant prié de le laisser aller ensevelir son père, il le lui refusa, pour nous apprendre que de toutes les œuvres la plus nécessaire c’est de le suivre. Si, vous me dites que la promesse qu’il leur faisait était grande, je vous répondrai que je les en admire davantage, eux qui, sans avoir encore vu aucun miracle de Jésus, ne laissèrent pas d’ajouter foi à une si grande promesse et de tout quitter pour le suivre. Car ils crurent que les mêmes paroles qui avaient été comme l’hameçon qui les avait pris, leur serviraient d’un hameçon à leur tour, pour prendre et convertir un jour tous les autres hommes. Ce tut donc là la promesse qu’il fit à saint Pierre et à saint André; car pour saint Jacques et saint Jean, il ne leur promet rien de semblable, parce que l’exemple de l’obéissance de ces deux premiers leur avait déjà comme ouvert le chemin de la foi; d’ailleurs ils avaient déjà entendu de grandes choses sur le compte du Sauveur. Mais considérez avec quelle exactitude l’Evangile nous marque leur pauvreté!